lundi 25 mai 2009

L’Ecole des systèmes sociaux

L'Ecole des systèmes sociaux considère l'entreprise comme une organisation sociale. En conséquence, elle analyse les disfonctionnements et les politiques sociales de l'entreprise à partir d'une conception des besoins et des motivations de l'homme au travail. La viabilité d'une entreprise est jugée à l'aune de la satisfaction qu'elle procure à ses membres. Ses représentants les plus connus sont Abraham Maslow, Frederick Herzberg et Douglas Mac Gregor.

Abraham Maslow (1908-1970) est psychologue considéré comme le principal meneur de l'approche humaniste, surtout connu pour son explication de la motivation par la hiérarchie des besoins. Dans Motivation et personnalité (Motivation and personality, 1954), il réalise une typologie des besoins qui est souvent représenté en marketing par une pyramide. Selon cette typologie, il est possible de distinguer cinq niveaux de besoins : les besoins physiologiques (la faim, la soif), les besoins de sécurité (le désir d'avoir un endroit où dormir, un travail) ; les besoins d'appartenance (désir de faire partie d'une famille ou d'un groupe d'amis) ; les besoins d'estime de soi (le désir de reconnaissance) ; et les besoins d'auto-accomplissement (le désir de se réaliser soi-même à travers une œuvre, un engagement). L'apparition de ces besoins est hiérarchisée : ce n'est que lorsqu'une catégorie de besoins est satisfaite que la catégorie suivante fait son apparition. Concernant leur rapport avec la motivation, ces besoins n'ont pas le même impact sur le niveau d'engagement des individus au sein de l'entreprise. Alors que les besoins primaires (physiologiques, de sécurité) sont limités, les besoins supérieurs (appartenance, estime de soi, auto-accomplissement) sont illimités. Ainsi, permettre au personnel de satisfaire des cinq catégories de besoin au sein de l'entreprise engendre un gain d'efficacité supplémentaire. Dans l'organisation classique traditionnelle, le système de relations au moyen d'une autorité imposée et de répartition du travail par parcellisation des tâches empêche la satisfaction dans l'entreprise de ces besoins supérieurs. Cela conduit à une fuite de ces motivations hors de l'entreprise qui ne mobilise pas complètement l'énergie de ses membres. En outre, cette typologie montre qu'il faut tenir compte de la hiérarchie des besoins dans le management du personnel : il ne sert en effet à rien de valoriser un employé (estime de soi) si on fait peser sur lui la menace d'un licenciement (sécurité fragilisée). Sa motivation liée au désir de reconnaissance ne pourra se développer au de l'entreprise seulement s'il satisfait d'abord son besoin de sécurité.

Typologie des besoins selon Maslow.


Frederick Irving Herzberg (1923 - 2000) est un psychologue américain connu pour avoir repérer les éléments qui sont des facteurs de satisfaction et d'insatisfaction au travail. Dans son livre Le travail et la nature de l'homme (Work and the Nature of Man, 1966), Herzberg classe les sources de satisfaction en deux catégories : les facteurs d'hygiène et les facteurs de motivation. Les facteurs d'hygiènes renvoient à l'environnement du travail : les rémunérations, les relations sociales et les facteurs d'ambiance. Ce sont en fait plus généralement ce qu'on appelle les conditions de travail. En dessous d'un niveau de base, le travail est moins efficace. En revanche, des conditions de travail qui sont supérieures à ce niveau de base n'augmentent pas nécessairement la productivité. Les facteurs de motivation renvoient eux au contenu du travail : les responsabilités, l'autonomie, les évolutions de carrière, la variété du travail. Ces facteurs valorisants correspondent aux besoins supérieurs de Maslow : ils relèvent de l'épanouissement de l'individu. Une fois les facteurs d'hygiène assurés les facteurs de motivation peuvent être remplis pour générer de la satisfaction. Si l'on veut augmenter la productivité, ce sont ces facteurs de motivation qu'il faut prendre en considération. Trop souvent, les politiques sociales de l'entreprise se focalisent sur les facteurs d'hygiène. Or la satisfaction propre à ce type de facteur n'est pas la même : la cessation de mauvaises conditions de travail procure un soulagement immédiat, mais pas une satisfaction durable. Le rôle que jouent ces facteurs est donc essentiellement négatif. Au contraire, les facteurs de motivation ont un rôle positif : comme ils renvoient à des besoins illimités, ils peuvent conduire à une satisfaction durable et donc à un investissement plus grand des individus en vue de leur maximisation.

Douglas Mc Gregor (1906-1964) est un psychologue américain, professeur de management, qui a travaillé notamment dans le domaine de la psychologie industrielle. En 1960, il publie La dimension humaine de l'entreprise (The Human Side of Enterprise, 1960) où il distingue deux théories de l'homme à travers les différentes méthodes de management : la théorie X et la théorie Y. Dans la théorie X, l'homme n'aime pas travailler, il ne travaille que sous la contrainte et il est improductif s'il n'est pas surveillé. En revanche, dans la théorie Y, l'homme aime travailler, il a besoin d'autonomie et sa créativité doit être suscitée. La théorie X correspond à l'analyse classique de l'homme au travail et à une vision de la nature humaine essentiellement mauvaise : postulat d'une aversion innée pour le travail, nécessité de la contrainte, du contrôle et de la sanction, fuite vis-à-vis des responsabilités, recherche de sécurité et d'avantages matériels. La théorie Y tente au contraire d'intégrer (principe d'intégration) et de rendre compatibles les buts individuels du personnel et les buts de l'entreprise, selon une conception de la nature humaine comme essentiellement bonne : l'effort physique et mental nécessaire dans le travail est aussi naturel que le jeu et le repos, en outre, d'autres moyens que les sanctions sont possibles pour obtenir un effort dirigé vers les objectifs de l'entreprise, étant donné que l'homme peut faire siens certains de ces objectifs en fonction des satisfactions (matérielles, intellectuelles, morales, sociales) qu'il peut tirer de leur réalisation. Les objectifs de l'entreprise peuvent donc constituer des moyens de réaliser le désir d'accomplissement qui occupe le sommet de la pyramide de Maslow. Pour cela, il faut cependant que l'entreprise respecte le principe d'intégration : pour majorer son efficacité, elle doit adapter les besoins du travailleur aux besoins de l'entreprise. Dans son organisation générale, ses conditions de travail, son système de rémunération, elle doit parvenir à faire converger les buts individuels et ceux de l'organisation. En pratique, la théorie X et la théorie Y peuvent être toutes deux sollicitées. La théorie X s'applique aux situations statiques caractérisées par un besoin de stabilité. Prépondérante dans les politiques du personnel du passé, elle demeure d'application fréquente, notamment pour les exécutants. La frustration des besoins élémentaires dont souffrent encore souvent la majorité des exécutants canalise en effet leur énergie vers la lutte pour satisfaire ces besoins là, tandis que les besoins supérieurs demeurent assoupis. Cette frustration engendre cependant les mêmes conséquences que l'inassouvissement des besoins matériels sur les motivations : passivité, hostilité et refus de coopération. La théorie Y s'applique aux situations évolutives et dynamiques. Elle satisfait simultanément les besoins de développement de l'homme au travail et de l'entreprise à laquelle il appartient. Elle tend à être de plus en plus appliquée, notamment pour le personnel d'encadrement. Le manager est donc souvent en situation d'arbitrage entre ces deux théories et ces deux conceptions : d'un côté, le bâton, de l'autre la carotte.

En conclusion, il résulte de ces diverses analyses psychologiques que les rapports de l'homme avec son travail sont extrêmement variables pour deux raisons essentielles : une conception ambivalente de la nature du travail et une diversité des motivations vis-à-vis de lui. Le travail tout d'abord, peut être défini soit comme une activité pénible par nature (travail vient du latin tripalium désignant un instrument de torture), soit comme une occupation agréable. Cette représentation dépend des conditions de travail et du contenu du travail, deux variables sur lesquelles l'entreprise peut agir, mais de manière limitée à cause des contraintes techniques et des impératifs économiques dont elle l'objet. Ensuite, les motivations des individus à l'égard du travail sont très diverses et sont souvent liées à leur niveau d'aspiration très variable selon les personnalités, le milieu socio-éducatif, le niveau culturel et le revenu. Cette double hétérogénéité du travail à la fois dans sa nature et dans les attitudes à son égard rend particulièrement délicate la définition de la politique sociale des entreprises où l'on rencontre toujours différentes sortes de travail et différentes catégories de personnel. On trouve donc fréquemment plusieurs politiques sociales différenciées selon les catégories de travail et de travailleurs intéressés au sein d'une même entreprise.

1 commentaire:

  1. la satisfaction au travail est fonction de nombreux facteurs sur lesquels la gestion des ressources humaines peut agir : La multitude d’expérimentations et de pratiques empiriques en entreprise, s’accordent pour conclure que la satisfaction au travail est basée sur toute une série de conditions de travail favorables : Les méthodes de Karasek, Theorell et Siegrist proposent trois axes d'analyse dont les croisements sont significatifs d'une situation de travail : http://www.officiel-prevention.com/formation/formation-continue-a-la-securite/detail_dossier_CHSCT.php?rub=89&ssrub=139&dossid=464

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