lundi 25 mai 2009

L’Ecole des relations humaines

L'Ecole des relations humaines est un mouvement intellectuel né dans le cadre de la crise économique de 1929 rattaché à l'étude des organisations. Il prend place après le développement et l'application à grande échelle du taylorisme (aussi appelé l'Ecole classique) qui tend à centraliser l'analyse sur le processus productif en laissant de côté l'homme au travail. Sa conception de l'homme lui offre donc un cadre théorique pour penser la gestion des ressources humaines : l'homme ne recherche pas qu'un profit pécuniaire, mais aspire aussi à un niveau de vie satisfaisant ; il a également l'instinct grégaire : il a besoin de faire partie d'un groupe ou d'un clan où il a sa place et où il es reconnu ; enfin, les besoins fondamentaux de l'homme au travail sont la communication, l'échange, les stimulations positives, la reconnaissance des efforts et la valorisation de ses capacités : s'ils sont comblés, il augmente de lui-même sa contribution aux résultats de l'entreprise à laquelle il appartient. Les thèmes d'étude de cette école sont : les facteurs d'ambiance, les phénomènes de nature psychosociale (leadership, tensions, types de relations), les communications interpersonnelles, les phénomènes informels (rumeurs, liaisons informelles) et les conflits (modalités de déroulement et de résolution). Ses principaux représentants sont : George Elton Mayo, Alexander Bavelas, Kurt Lewin et Jacob Levy Moreno.

George Elton Mayo (1880 – 1949) est généralement considéré comme l'initiateur des recherches sur les relations humaines dans l'industrie. Son intuition est que l'homme ne peut trouver le bonheur et la sécurité qu'à la condition de sentir son appartenance au groupe dans lequel il travaille. Alors qu'il travaille dans l'usine Hawthorne de la Western Electric Company Western Electric de 1927 à 1932, où il fait des expériences concernant les facteurs d'ambiance, il remarque que le rendement du groupe de travail augmente lorsque les facteurs d'ambiance sont améliorés (diminution des horaires, droit de parler pendant le travail, repas gratuit), mais que, paradoxalement, le rendement élevé se maintient même lorsqu'ensuite les conditions initiales d'ambiance (défavorables) sont rétablies. Ces résultats le conduisent à l'idée que des éléments autres que les facteurs d'ambiance interviennent. Après avoir réalisé une série d'interviews avec les ouvrières, il est amené à considérer que ce ne sont pas des facteurs matériels qui gouvernent principalement le rendement mais des éléments de nature psychosociale, notamment : l'influence du groupe, l'importance de l'information, les communications internes au groupe et la nature des relations avec l'encadrement. De cette manière naît l'idée principale de cette Ecole des relations humaines : la productivité est liée à la satisfaction qui elle-même dépend de facteurs sociaux. Mayo tire les conclusions de son enquête dans deux petits ouvrages qui ont un retentissement considérable : Les Problèmes humains de la civilisation industrielle (The Human Problems of an Industrial Civilization, 1933), et Les Problèmes sociaux de la civilisation industrielle (The Social Problems of an Industrial Civilization, 1947). En outre, cette expérience lui inspire l'idée du counseling : les entretiens réalisés avec le personnel de Hawthorne ayant porté leurs fruits, il recommande d'introduire dans les entreprises des équipes d'experts-conseils, payés par la direction, mais neutres, qui recueilleraient les confidences des ouvriers, en leur garantissant le secret, et leur permettraient de se décharger des tensions qu'engendrent les relations de travail dans l'industrie.

Alexander Bavelas (1920) est un psychologue et sociologue américain qui a fondé le Group Networks Laboratory au MIT en 1948. Dans son Étude sur les réseaux de communication (1950), il émet l'hypothèse que les propriétés des réseaux de communication impact la performance des groupes. Afin de valider sa proposition, il mesure la communication selon le concept de distance, et cela sur trois réseaux de communication différents : réseau en croix (structure hiérarchie organisée autour d'un individu particulier), en cercle (chaque participant a une situation identique à celle des autres) et en chaîne (les individus terminaux n'ont qu'un seul interlocuteur). Selon Bavelas, les propriétés des réseaux de communication déterminent la structure de l'activité du groupe sur trois plans : le rendement, le leadership et le moral. Sur le plan du rendement, plus le réseau est centralisé plus la résolution du problème est rapide, le nombre d'erreurs faible et le nombre de messages échangés réduit. Le réseau en croix apparaît comme le plus efficace. Sur le plan du leadership, dans les réseaux où personne n'occupe une position centrale, aucun leader ne se dégage ; en revanche, dans un réseau centralisé, celui qui émet et reçoit plus d'informations que les autres est choisi aussi comme leader. Les possibilités de commandement d'un individu sont donc largement conditionnées par sa position à l'intérieur du réseau de communication. Sur le plan du moral, il faut distinguer le moral du groupe (en moyenne) et le moral de chacun des participants. Dans les réseaux centralisés le moral moyen est faible, les individus périphériques (placés aux extrémités de la ligne de communication) ont un mauvais moral ; au contraire, les individus centraux ont un moral élevé. Les premiers sont peu satisfaits de leur travail parcellaire, ainsi que de leur place dans le groupe où ils apparaissent comme des exécutants. Les seconds au contraire sont satisfaits de leur travail et de leur place dans le groupe. Inversement dans les réseaux non centralisés (réseau en cercle notamment), le moral des divers participants est meilleur en moyenne et il y a peu d'écarts entre eux. Ils ont l'impression d'être des participants plutôt que des exécutants.

Kurt Lewin (1890-1947) est un psychologue pionner dans le domaine de psychologie sociale. Il réalise en 1939 une expérience avec ses collaborateurs dont les principaux résultats sont publiés dans une revue de psychologie sociale (Lewin Kurt, Lippitt Ronald et White Ralph, « Patterns of aggressive behaviour in experimentally created social climates », 1939). Il s'agit d'étudier divers styles de commandement : autoritaire, laissez-faire et démocratique. Premièrement, le commandement autoritaire implique une distinction importante entre le décideur et le groupe qu'il dirige. Le chef définit le rôle de chacun, répartit le travail, décide seul sans participer à l'action et ses ordres doivent être exécutés sans discuter. C'est le style de commandement le plus efficace en termes de productivité, mais aussi le plus enclin à provoquer la défiance du groupe. Deuxièmement, le commandement laissez-faire se caractérise par une faible implication du décideur. Le chef laisse ses subordonnés agir, en ne fournissant des indications qu'à leur demande. Il n'y a pas de localisation précise de l'autorité. Un groupe gérer de cette manière éprouve de grandes difficultés pour agir parce qu'il lui manque un cadre de fonctionnement. Enfin, le commandement démocratique fonctionne à l'incitation et au dialogue : l'apprentissage des règles se fait de manière collective et une place est laissée pour l'initiative et la créativité. Le chef collabore avec ses subordonnés pour la définition des objectifs et le choix des moyens. Il décide après avoir consulté les autres membres du groupe et en tenant compte de leurs avis. C'est à cette forme de commandement que va la préférence des auteurs. Cette étude contribue à montrer la supériorité des comportements de coopération et d'intégration tenant compte des besoins du groupe sur les comportements de domination en ce qui concerne le leadership. On peut relever quatre avantages principaux à l'adoption de structures démocratiques en ce qui concerne la conduite des hommes au travail : la résolution des problèmes est plus efficace, l'agressivité de chaque membre est canalisée dans un sens constructif, les relations internes sont meilleures (grâce à un meilleur climat social) et chaque participant a un meilleur moral.

Américain d'origine roumaine, Jacob Lévi Moreno (1889-1974) est un médecin psychiatre, psychosociologue, fondateur du psychodrame, de la sociométrie et l'un des pionniers de la psychothérapie de groupe. Pour connaître et mesurer les relations interprofessionnelles dans un groupe, Moreno a créé le sociogramme dont il expose le principe dans Les Fondements de la sociométrie (1933). Il s'agit d'un diagramme représentant les liens sociaux qu'une personne possède. On le réalise en demandant à chacun des membres d'un groupe les sentiments qu'il éprouve à l'égard de chacun des autres membres. Cet outil permet d'objectiver la dynamique du groupe. Les sentiments sont classés en trois catégories : sympathie, antipathie, indifférence. Le sociogramme représente graphiquement l'état de ces relations interpersonnelles. Il permet notamment d'identifier des isolés au sein du groupe, des sous-groupes, des leaders du groupe (personne choisie par plusieurs autres) ou de mettre en évidence le climat du groupe et sa cohésion. Le sociogramme débouche sur la thérapie du groupe car elle conduit à constituer les groupes de travail selon les affinités des individus, ce qui réduit les tensions et améliore le moral. C'est un moyen de constituer des groupes de travail cohérents et efficaces.

En conclusion, l'étude des relations humaines montre la complexité et le nombre de facteurs conditionnant les comportements humains au travail, notamment les facteurs d'ambiance (climat social), psychologiques (affectivité et moral) et sociologiques (appartenance à un groupe). Il est donc intéressant pour une entreprise de les prendre en compte et de réaliser des actions ponctuelles sur des équipes ou des services afin d'en améliorer la productivité. Plus globalement, cette étude révèle la dimension politique des relations humaines dans une entreprise, et donc l'importance de se doter d'une politique du personnel bien définie pour améliorer la cohésion, la coordination et l'efficacité.


5 commentaires:

  1. Excellente synthèse qui complète bien mes cours, surtout sur Moreno dont je disposais de peu d'éléments.

    Merci

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  2. Génial, je suis bien satisfait de cette synthèse même si il est un résumé des idées principales de chaque auteurs, ça reste très important et efficace

    Merci trop

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  3. Génial, je suis bien satisfait de cette synthèse même si il est un résumé des idées principales de chaque auteurs, ça reste très important et efficace

    Merci trop

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  4. je veux la conclusion de votre pensée sur le sujet qu'on traite s'il vous plait

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  5. Svp j'en ai besoin d'une petite introduction car j'en ai un exposé à faire sur cette école

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