lundi 18 mai 2009

La révolution industrielle en France

Si la révolution agricole apparaît en Angleterre dès le milieu du XVIIe siècle, les progrès en France sont plus tardifs et la révolution industrielle se met beaucoup plus lentement en place. Cela tient en partie à la spécificité de l'organisation de l'agriculture française, à des caractéristiques structurelles comme l'importance de la main d'œuvre et la faiblesse des ressources en matière première et un modèle de croissance français original.

L'agriculture française est caractérisée par l'absence du mouvement des enclosures, l'importance d'un individualisme agraire et un morcellement des terres peu favorable à la diffusion des innovations techniques. Les progrès des rendements dans l'agriculture française ont un siècle de retard sur l'Angleterre. L'absence du mouvement des enclosures n'a pas permis de développer un équivalent du système de Norfolk, c'est-à-dire ce type d'agriculture développé dans cette région d'Angleterre notamment par Charles Townsend qui consiste en une rotation des récoltes sur quatre champs, en utilisant les propriétés des cultures pour ajouter des nutriments aux terres, ce qui permettait de supprimer la jachère. En outre, selon M. Bloch, l'« individualisme agraire » prédomine dans les mentalités paysannes : les paysans étant souvent propriétaires de la terre qu'ils exploitent, notamment grâce à la Révolution française. Cette multiplicité de petits propriétaires fonciers a empêché le développement d'un capitalisme agraire calqué sur le modèle anglais. Le morcellement des terres n'était pas non plus propice à la diffusion des nouvelles techniques et des nouvelles méthodes de culture.

Il faut cependant relever l'originalité du modèle de croissance français. Le XIXe siècle est une longue période de transition politique qui fait passer la France de la société d'Ancien Régime à la société du capitalisme industriel. Durant ce passage, on trouve un dualisme économique entre la France agricole et la France industrielle. Jusqu'à la mi-XIXe siècle, la France est une nation paysanne largement dominée par l'économie rurale. Son agriculture est caractérisée par des rendements faibles et une parcellarisation des terres. Le changement d'organisation sociale est freiné par cette structure de petite paysannerie et de notables locaux possédant une fortune foncière. Cependant, c'est l'accroissement des richesses dans l'agriculture sur la période 1840-1860 et la révolution ferroviaire qui vont permettre la croissance industrielle.

Selon J.C. Asselain, on peut distinguer trois phases dans le développement de l'industrie française.

1/ La première est une phase de « modernisation rapide » (1840-1860) : le chemin ferré connaît un développement considérable à partir de 1842 où la Monarchie de Juillet (1830-1848) lance un programme de constructions de grandes lignes. Ces constructions ont un effet d'impulsion sur l'industrie française grâce à la politique protectionniste héritée de la Révolution (1789-1799) et de Napoléon 1er (1799-1815). L'activité de construction de chemin de fer devient ainsi le moteur de l'industrie métallurgique et de la construction mécanique.

2/ La deuxième phase est une phase de « ralentissement prolongée » (1860-1892) : l'instauration du libre-échange par le traité commercial entre la France et l'Angleterre en 1860 n'a pas détruit les industries françaises, mais leur croissance économique s'est ralentie. Cela s'explique notamment par la hausse des importations de produits manufacturés et la hausse des exportations de produits agricoles. Il faut également mentionner la guerre franco-prussienne (1870-1871) qui se solde par une défaite de la France et des conséquences économiques graves du fait de la perte de l'Alsace et la Lorraine. Il y a enfin une série de crises agricoles qui entraîne une baisse des revenus pour les paysans et une diminution de la demande en biens manufacturés. Des freins à ces crises ont été trouvés grâce à un accroissement des dépenses publiques et à une politique de grands travaux.

3/ La troisième phase est une phase de « redressement » (1892-1914). Elle est caractérisée par un retour au protectionnisme. Dès 1982, le tarif Méline dénonce tous les traités en vigueur. Ce protectionnisme a permis : de limiter la baisse des prix et de maintenir des petites exploitations peu viables dans l'agriculture et d'instaurer avec les partenaires économiques un système de négociations permanentes et de concessions équilibrées qui s'est avéré efficace. Par ce biais, au début du XXe siècle, la France est parvenu à réduire de manière sensible son retard par rapport à la France et à l'Allemagne.


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