dimanche 24 mai 2009

L’Organisation Scientifique du Travail

L'Organisation Scientifique du Travail (OST) est une méthode de management et d'organisation des ateliers de production, dont les principes ont été développés et mis en application industrielle par Frederick Winslow Taylor (1856-1915) au début du XXe siècle. Auparavant, l'organisation du travail était exclusivement empirique. Seuls quelques techniciens avaient, sur des points particuliers et sans théorie d'ensemble, formulé des principes d'organisation du travail fondés sur une étude rationnelle du problème spécifique à résoudre (exemple : la mesure des temps de travail nécessaires à la réalisation de certaines tâches : sciage, assemblage). C'est avec le taylorisme que les analyses systématiques de l'organisation du travail commencent réellement.

Les Principles of Scientific Management (Principes de management scientifique) publiés en 1911 ne constituent pas la première œuvre importante de Taylor, mais ils sont le fruit de la réflexion d'un ingénieur qui a travaillé pour de très grandes entreprises comme la Midvale Steel Company de Philadelphie et la Bethlehem Steel Company. Il s'agit donc de la synthèse d'une expérience destinée à replacer les problèmes de l'atelier dans l'ensemble des problèmes sociaux. En effet, Taylor cherche un moyen d'augmenter la productivité des entreprises tout en évitant de se heurter au mouvement ouvrier organisé. Il va donc substituer à l'augmentation des cadences peu populaires des nouvelles méthodes de travail impliquant une redéfinition rationnelle et a priori des tâches, ainsi qu'un outillage nouveau. Pour paradoxal que cela puisse paraître aujourd'hui, l'objectif premier de son étude est bien de procurer le maximum de prospérité en réconciliant les intérêts des employeurs et ceux des salariés.

La nouveauté la plus marquante de l'OST est la séparation radicale entre ceux qui conçoivent (la maîtrise) et ceux qui produisent (les ouvriers spécialisés). Pour Taylor, l'ouvrier n'est pas là pour penser, mais pour exécuter des gestes savamment calculés pour lui. Tout travail intellectuel doit être enlevé de l'atelier pour être concentré dans les bureaux de planification et d'organisation de l'entreprise. Ces bureaux ont pour fonction de parcelliser le processus de production de manière à ce qu'il soit le plus efficace possible. Afin d'améliorer la productivité, l'élimination des facteurs d'inefficacité dans le travail est préconisée : suppression des temps morts et des files d'attente (matières devant les postes de travail, en-cours de production) et augmentation des rendements (des matières, des machines, de la main-d'œuvre. L'encadrement a pour rôle d'étudier minutieusement les temps et les mouvements, puis de transmettre les nouveaux paramètres plus efficaces aux ouvriers. Ces ouvriers sont encouragés à être performant par un système de prime.

Concrètement, l'OST repose sur la rationalisation du travail qui comporte plusieurs phases : tout d'abord, une phase d'observation et d'analyse du travail à effectuer afin de le décomposer en tâches élémentaires. Puis chaque élément analysé fait l'objet d'une étude critique : les positions, les gestes, les outils, les équipements, les matières, les emplacements, le déplacement des flux sont soumis à l'examen en vue de majorer leur efficacité. Le travail est ensuite recomposé de manière à éviter les déplacements et les gestes inutiles (arrêts, transports, attentes déplacements) et en combinant ceux qui peuvent être accomplis simultanément. Il s'agit non seulement de repenser l'agencement des postes de travail (emplacement, orientation, accessibilité des outils et des matières), mais aussi d'améliorer les équipements et les outillages utilisés par des études d'ergonomie, technique ayant pour but l'adaptation du travail à l'homme. Une quatrième étape consiste en la détermination des temps d'exécution nécessaires pour les opérations. Enfin, des fiches d'instruction sont rédigées et la nouvelle organisation du travail est mise en pratique, encadrée par des formations et un suivi d'exécution.

L'OST a permis un véritable progrès dans l'efficacité économique caractérisée par des gains de productivité, une baisse des coûts de production, une régularité de la qualité des fabrications, une production en série et une consommation de masse. Son bilan social est en revanche désastreux puisqu'elle entraîne une hausse de l'absentéisme, elle engendre aussi un turn-over (rotation du personnel), un manque de motivation, une indifférence et une apathie, des conflits avec la maîtrise, des conflits collectifs du travail (grève) et une médiocre qualité du travail. D'une manière générale, les limites de l'OST résultent tant du contenu du travail (trop restreint) que des conditions de travail (trop défavorables : facteurs d'ambiance, cadences de travail). Les tendances contemporaines de l'organisation du travail ont donc cherché à remédier aux effets néfastes du taylorisme.

Fondée et représentée principalement par des ingénieurs et des techniciens, l'accent est mis sur les impératifs techniques et matériels de la production. L'entreprise est envisagée comme un ensemble de postes de travail où l'homme apparaît de manière secondaire par rapport à l'ensemble productif. Son fond théorique est la microéconomie classique qui ne prend en compte dans la fonction de satisfaction la seule variable du revenu monétaire. Elle sous-estime donc la complexité des motivations, notamment les motivations non pécuniaires.

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